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Affaires jeunes activistes LUCHA - Deux audiences simultanées ce jeudi 03 mars à Goma, par Justin Kikandi, LUCHA

1. Ceux qui ont osé faire le deuil des victimes de massacres à Beni:

Au tribunal de grande instance, c'est l'épilogue de la parodie de procès de nos deux camarades Juvin Kombi et Pascal Byumanine, avec leurs 7 co-détenus, avec les plaidoiries de la défense. Signalons qu'à l'audience de la semaine dernière, le parquet avait lu ses réquisitions, dans lesquelles il a demandé que ces jeunes soient condamnés à 10 ans et 2 mois de prison ferme. Ils sont poursuivis ensemble pour atteinte à l'ordre public, incitation à la révolte contre les autorités, destruction méchante des biens, et association de malfaiteurs. Ils avaient été arrêtés le 28 novembre 2015 à Goma (il viennent de dépasser 3 mois en détention), lors de la répression violente par la Police d'une manifestation pacifique que nous avions organisée au quartier Majengo (nord de Goma) pour rendre hommage aux victimes des massacres de Beni, et interpeller les autorités sur leur inaction face à ces massacres qui continuent encore aujourd'hui. L'audience devrait débuter tout à l'heure à 9h00, au TGI de Goma.

2. Début du procès en appel pour les 6 Lucha qui ont osé croire en la "victoire de la démocratie en 2016"

A la Cour d'Appel de Goma, toujours à 9h00, ce sera le début du procès en appel de nos 6 camarades arrêtés à Goma dans la nuit du 15 au 16 février 2016, et condamnés la semaine passée à 2 ans de prison ferme par le TGI de Goma pour "tentative d'incitation à la révolte contre les autorités". Nos camarades avaient interjeté appel contre ce honteux jugement le vendredi 26 février. Puis, le lundi 29, alors que le porte-parole du gouvernement Lambert Mende s'emportaient contre les gouvernements et organisations qui avaient dénoncé l'instrumentalisation évidente de la Justice, le parquet avait à son tour interjeté appel. Pour nous, cette peine est inacceptable, et nous allons demander à la Cour d'Appel de Goma de corriger l'iniquité des premiers juges et d'acquitter purement et simplement nos six camarades. Mais vraisemblablement, malgré l'absence criante d'une quelconque preuve et tous les vices de procédure, le parquet estime pour sa part que 2 ans sont insuffisants, et va requérir la peine la plus lourde (pouvant aller jusqu'au-delà de 10 ans !). Bien plus, le parquet a inventé une nouvelle infraction : celle de "tentative d'atteinte à la sûreté de l'Etat". Pour rappel, le TGI de Goma avait acquitté nos camarades de l'infraction d' "association de malfaiteurs" et avait refusé de se prononcer sur l'infraction de tentative d'atteinte à la sûreté de l'Etat, évoquée pour la première fois par le parquet au moment des plaidoiries, à la surprise générale de tous ceux qui ont une notion de droit.

Il vous souviendra que nos 6 camarades avaient été arrêtés pendant la nuit, alors qu'ils dormaient dans une maison appartenant à une association locale, après avoir préparé des banderoles et des morceaux de carton avec comme message principal "2016 nous voulons des élections dans le respect de la Constitution". Ces banderoles (une quarantaine au total, écrites en Swahili et en Français) devaient être montrées pendant la manifestation d'accueil de l'équipe nationale de football à Goma; manifestation à laquelle le gouverneur Julien Paluku avait invité toute la population, espérant ainsi faire échec à la journée villes-mortes que nous avions co-organisée avec le Front Citoyen 2016 le 16 février 2016 pour honorer la mémoire des martyrs de la démocratie de février 1992 et lancer un avertissement fort au président Joseph Kabila et ses soutiens sur le fait que les Congolais veulent l'alternance démocratique dans les délais constitutionnels. Les policiers qui avaient arrêtés nos 6 camarades l'avaient fait à des heures tardives de la nuit (vers 4heures du matin), dans une propriété privée, et sans aucun mandat de perquisition. Ils avaient en outre battu nos camarades, les avaient ligotés avec des cordes au point de les blesser aux bras (ils portent encore des cicatrices), et avaient ravi tous leurs biens (argent, téléphones, ordinateurs, ....). Enfin, le parquet, dans son désir de faire condamner à tout prix nos camarades, avait produit de fausses preuves, en l'occurence un grand pneu presque neuf que la police accusait nos camarades d'avoir voulu brûler sur la voie publique, et un calicol avec un message relatif au conflit ethnique en cours entre les Hutu et les Nande dans le sud du territoire de Lubero. Ce calicot avait été confisqué par le Service du Protocole d'Etat du gouverneur Paluku et le Maire de Goma en personne lors du festival Amani au collège Mwanga de Goma, au vu et au su de beaucoup de témoins. Comment ces choses avaient pu se retrouver dans le dossier de nos camarades ? Alors que nous avions réussi à trouver les propriétaires de ce pneu et de ce calicot qui acceptaient de temoigner, le tribunal avait refusé de les convoquer et de les entendre, et avait tout simplement écarté ces "preuves" de la procédure et ordonné la restitution de ces choses à leurs vrais propriétaires. Or, dans un procès pénal, de telles fabrications auraient dû avoir pour conséquences de discréditer toute la procédure et de permettre la relaxe des prévenus (le doute profitant à l'accusé). Si le droit était respecté, ces seules conditions d'arrestation auraient suffi pour que la Justice ordonne leur libération et poursuive au contraire les policiers responsables de ces abus. Enfin, comme nous l'avons dit et redit, cette arrestation était commanditée par le gouverneur du Nord-Kivu Julien Paluku en personne. Nous en avons la preuve. Nous pensons qu'il est aussi co-responsable avec certaines autorités et sécuritaires politiques à Kinshasa des pressions exercées sur les juges du TGI de Goma pour condamner nos camarades, en dehors de tout cadre légal.

Importance de la mobilisation et des réactions internationales

Ces parodies de procès ont mis en lumière l'instrumentalisation de plus en plus croissante de la Justice à des fins politiques, dans la répression des libertés publiques au fur et à mesure que la fin du mandat du président Kabila approche. C'est grâce à la forte mobilisation médiatique et diplomatique. Nous voulons ici remercier les chancelleries, les organisations de défense des droits de l'Homme (y compris le BCNUDH) et les médias qui ont suivi avec beaucoup d'attention ces affaires, et qui ont dénoncé énergiquement la honteuse sentence du 24 février 2016.

Il est peu probable que les autorités suivent ces différents appels à la raison, à la fin de la restriction des libertés publiques et au respect de l'indépendance de la Justice. La sortie du porte-parole du gouvernement lundi dernier en est la preuve. Au nom de quel principe a-t-il pris la parole pour parler au nom d'un Pouvoir Judiciaire qu'il prétend être indépendant ? Il a fait des affirmations qui cachent mal les pressions que les autorités politiques exercent réellement sur la Justice. Cependant, il ne faut pas baisser l'attention sur ces affaires. Il ne faut pas céder au chantage des autorités, qui voudraient pouvoir réprimer sans témoin et sans que la communauté internationale puisse réagir. Même les médias indépendants qui, contrairement à la RTNC, rapportent les faits, sont ouvertement intimidés ou fermés.

Nous pensons aussi que la communauté internationale doit maintenant aller au-delà des dénonciations et des condamnations à coup de déclarations outrées et de communiqués, et prendre des mesures concrètes pour arrêter cette course à la répression systématique contre toute voix discordante qui est entrain de se renforcer à l'approche de décembre 2016. Continuer à attendre ne fera qu'empirer la situation ! Par exemple, le soutien au secteur de la Justice, à la Police et à certaines autres institutions devrait être désormais soumis à une stricte conditionnalité par rapport au respect des droits de l'Homme et des libertés publiques, notamment la liberté d'opinion, d'expression et de manifestations pacifiques. Au besoin, certains responsables de la répression devraient déjà subit des sanctions ciblées graduelles, si l'on veut prévenir une situation ingérable comme celle du Burundi actuellement. Il vaut mieux prévenir que guérir, dit-on, et la communauté internationale dispose de leviers importants dont elle devrait avoir le courage de se servir sans attendre ! 

Merci donc de rester mobilisés ! Nous, en tant que citoyens, nous continuerons de jouer sereinement et courageusement notre partition. Que ceux qui croient en la liberté et la démocratie jouent aussi la leur !

 

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LUCHA (Lutte pour le Changement).
Mouvement citoyen, non-violent et non-partisan des jeunes Congolais (R.D. Congo) de tous milieux, origines, religions...qui partagent le désir d'un Congo Nouveau, véritablement indépendant, uni, démocratique, paisible et prospère, et qui militent pour son avènement, à travers des actions non-violente.

Nous croyons en nous, en tant que jeunes et en tant que Peuple, pour façonner l'avenir du Congo. Ceux qui changeront le Congo, ce n'est pas l'ONU, les ONG, les étrangers, les "autres", Dieu : ce sont les citoyens Congolais eux-mêmes, à condition d'en avoir conscience et d'y oeuvrer avec courage et détermination.      

Tél. : +243 994 645 977

 

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