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Dr. Mukwege

Le Dr Mukwege: «Des millions s’envolent. Trop c’est trop», par Le Soir

En tournée européenne, le Docteur Mukwege a réagi aux révélations de Jean-Jacques Lumumba dans Le Soir sur la corruption au sein de la galaxie Kabila. Pour lui, il n’y a plus de dialogue possible.

l’issue d’une longue tournée qui l’a mené au Japon et en Corée, le Docteur Mukwege est repassé par la France et la Belgique où la commune de Woluwe saint Lambert lui a conféré le titre de citoyen d’honneur. Avant de présenter à Wolubilis son livre autobiographique « Plaidoyer pour la vie », (éditions l’archipel) le médecin chef de Panzi a accepté de commenter l’actualité congolaise de l’heure.

La situation sociale s’améliore-t-elle ?

Comme médecin je suis témoin de toute la misère du Congo. A Kamina, Kongolo, Pweto, nous faisons des campagnes pour aller soigner les femmes atteintes de fistules. Là, quand vous voyez la souffrance dans laquelle la population se trouve, il vous semble inimaginable qu’un Congolais puisse détourner des deniers publics, même cent dollars ce n’est pas admissible… Or il y a des millions qui partent, trop c’est trop. Quel que soit le budget de la Santé, il n’est jamais exécuté…Au Congo un scandale humain qui n’est plus acceptable. Le système actuel prive la population de l’éducation : alors que dans les pays voisins les enfants apprennent à utiliser les tablettes, chez nous même la craie manque, les bancs, les cahiers…Les parents doivent payer les enseignants insuffisamment rémunérés. Comme s’il fallait détruire l’éducation, afin de produire des gens qui n’ont pas la capacité de pouvoir se poser la question par rapport à eux-mêmes. A Bukavu, une ville d’un million d’habitants il n’y a pas de journal, donc pas d’accès à l’information. A tout moment le signal de radios comme RFI est coupé, l’Internet est perturbé… Comme si on voulait laisser la population dans l’ignorance…

La pauvreté gagne-t-elle du terrain ?

IL faut dénoncer aussi la paupérisation : à Bukavu, les agents de l’Etat ne sont pas payés, tout est fait pour maintenir les gens dans une pauvreté extrême. Dans une telle situation lorsque vous proposez 10 dollars à quelqu’un, il va se mettre à genoux. La paupérisation cela rime avec la corruption, et cela détruit votre conscience, vous empêche de réclamer vos droits…La corruption est devenue le mode de gestion de l’Etat… La répression vient couronner le tout. Ceux qui n’acceptent pas sont menacés de prison…Les gens finissent par penser que c’st leur bourreau qui les protège, c’est une sorte de syndrome de Stockholm…

Songez vous aux élections présidentielles ?

Les gens ne cessent de penser au toit, alors qu’il faut d’abord construire les fondations. Se battre pour les libertés fondamentales, pour la justice, lutter contre l’impunité. Mon combat aujourd’hui porte sur la liberté, la justice, la paix et le développement durable qui vont permettre au peuple congolais de retrouver la dignité perdue. Lorsque ces valeurs sont mises en place on pourra mettre au sommet des gens qui auront des bases solides…Il faut d’abord éveiller la conscience, faire démarrer une révolution morale, éthique… Je veux travailler à la base, éveiller les consciences. Au début de cette année des jeunes de tout le pays étaient venus à Bukavu, des membres de la société civile se sont rassemblés sous la bannière d’une organisation, « le chemin de la paix ». Il faut que les gens apprennent quels sont leurs droits leurs libertés fondamentales. Pour cela, pour discuter de manière démocratique, il faut assurer la liberté d’expression.

Un dialogue est-il encore possible ?

Il faut aussi qu’il y ait la justice : avec le dialogue tel qu’il s’est passé, on crée un Etat sans principes, sans lois, une véritable jungle.

Le dialogue ? J’y étais invité par M. Kodjo, mais j’ai dit « non merci » IL y a cinq ans que le président a tout fait pour aboutir à un tel résultat, une prolongation de fait de son mandat. Je suis légaliste, la Constitution est claire. Elle prévoit que le chef de l’Etat dispose d’un mandat renouvelable une fois. Pas deux. Donc, deux fois cinq ans, cela fait dix. Pas onze, par douze… C’est très clair. Pour moi après 1O ans le président est définitivement empêché par la Constitution… Tout le reste c’est de la tricherie. S’il y a empêchement définitif, constitutionnel, la loi est claire : c’est le président du Sénat qui doit assurer la fonction de chef de l’Etat. Point final. Pourquoi faudrait-il, en lui permettant de rester plus longtemps au pouvoir, remercier un chef de l’Etat qui n’a pas tenu ses promesses constitutionnelles qui étaient d’organiser les élections ?

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