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Néhémie Mwilanya Wilondja , Aubin Minaku, Joseph Kabila, Matata Mponyo et Evariste Boshab

Rapport ultrasecret: implications institutionnelles et politiques du non tenu de l’élection présidentielle dans le délai constitutionnel

A la croisée de chemins, le Congo s’est toujours distingué par la mauvaise interprétation ou application des articles tirés dans sa propre constitution. En effet, la trajectoire du Congo avait été déviée par suite de la crise constitutionnelle entre le président Joseph Kasavubu et son Premier ministre Lumumba.

Si on pouvait pardonner la génération de nos parents  ( Kasavubu, Lumumba ...) qui étaient aux commandes du pays — avec juste une poignée d’universitaires — on ne saurait pas aujourd’hui pardonner les faux-pas des universitaires comme Evariste Boshab, Aubin Minaku, Matata Mponyo, Léon Kengo wa Dondo, Néhémie Mwilanya Wilondja  et Kalev Mutond; en entrainant le pays dans un autre bourbier constitutionnel et plusieurs décennies de chaos et retard de développement.

Pour s’en assurer, nos fins limiers se sont dépensés pour trouver tout indice qui aiguillait le pays vers cette calamité et s’assurer que les tenants du pouvoir étaient conscients du crime qu’ils allaient perpétrer contre le peuple congolais. Voici le rapport.

LES IMPLICATIONS INSTITUTIONNELLES ET POLITIQUES DE LA NON TENUE DE L’ECTION PRESIDENTIELLE DANS LE DELAI CONSTITUTIONNEL EN REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO

  1. En novembre 2011, Joseph Kabila Kabange a été élu Président de la République Démocratique du Congo avec moins de 50% des suffrages exprimés pour un deuxième mandat de 5 ans. 
  1. Au regard de l’article 70 de la Constitution de la République Démocratique du Congo, son mandat actuel expire le 19 décembre 2016 à minuit et il ne peut pas en briguer un troisième.
  1. Comme l’exige la Constitution à son article 73, le scrutin pour l’élection de son successeur devra être convoqué 90 jours avant cette date.
  1. Conformément à l’article 74 alinéa 1er de la Constitution, « le Président de la République élu entre en fonction dans les dix jours qui suivent la proclamation des résultats définitifs de l’élection présidentielle ».
  1. Dans le concret, en application combinée des deux dispositions constitutionnelles pré rappelées (art 73 et 74 al 1er), l’élection présidentielle doit impérativement avoir lieu entre le 19 septembre et le 19 décembre 2016.
  1. Dans la situation d’impasse électorale actuelle délibérément créée par le Président Joseph Kabila qui tient à demeurer au pouvoir au mépris de la Constitution, il est possible que l’échéancier constitutionnel exposé ci-dessus ne soit pas respecté.
  1. Dans ces conditions, comment la République Démocratique du Congo fonctionnera t-elle sur le plan institutionnel et politique à partir du 20 décembre 2012 ?
  1. Pour répondre à cette question, il est important de souligner d’abord que la responsabilité de la crise actuelle incombe entièrement au Président Kabila et à ses partisans.
  1. En effet, dans un premier temps, ils ont tenté en vain d’accréditer l’idée de modifier ou de changer la Constitution du 18 février 2006. Ensuite, par une série d’initiatives et d’actes  illégaux et autoritaires, ils ont bloqué le processus électoral notamment en privant la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) des ressources financières nécessaires à l’accomplissement de sa mission, en la déstabilisant en vue de confier sa direction à leurs proches dont Monsieur Corneille Nanga, son Président, et en précipitant l’installation de nouvelles provinces afin d’alourdir ce processus. Depuis le mois de juillet de l’année dernière, ils s’emploient à imposer au Peuple un dialogue national sur le modèle du dialogue inter congolais de Sun City (Afrique du Sud) en 2003, afin de retarder le plus possible l’élection présidentielle.
  1. L’analyse des implications de la situation ainsi créée se cristallise sur deux questions principales :
  • le statut de Joseph Kabila le 19 décembre 2016  à minuit ;
  • la continuité de la fonction présidentielle et du processus électoral à partir du 20 décembre 2016 à zéro heure.
  1. Du statut de Joseph Kabila le 19 décembre 2016 à minuit
  1. Après sa réélection en fin novembre 2011, Joseph Kabila est entré en fonction comme Président de la République Démocratique du Congo, le 20 décembre de la même année, jour de sa prestation le serment constitutionnel devant la Cour Suprême de Justice faisant office de Cour constitutionnelle. 
  1. Comme rappelé ci-haut (article 70 de la Constitution), la durée du mandat présidentiel est de 5 ans. Les 5 ans sont comptés de date à date. Cette durée constitutionnelle est aussi celle de la validité du contrat politique conclu entre le Peuple et l’élu à la présidence de la République. Passé ce délai, Joseph Kabila ne sera, par conséquent, revêtu d’aucune légitimité populaire pour prétendre diriger la RDC.
  1. Il est, par conséquent, indiscutable qu’à la date du 19 décembre 2016 à minuit, le mandat du Président Joseph Kabila expirera tant en droit qu’en politique. Il ne sera plus légal ni légitime.
  1. Monsieur Joseph Kabila ne sera plus fondé à exercer l’une quelconque des prérogatives constitutionnelles du Président de la République Démocratique du Congo. Le Peuple congolais et la communauté internationale ne pourront plus lui reconnaître cette qualité ni traiter avec lui comme tel.
  1. C’est ce qu’en bon démocrate et en Homme d’Etat, l’ancien Président d’Haïti, Michel Martelly, a compris en quittant le pouvoir le 07 février 2016 à la fin de son mandat, alors que son successeur n’était pas encore élu.
  1. Ainsi, dès lors que le nouveau Chef de l’Etat n’a pas encore été élu et l’ancien n’en a plus la qualité, il y a vacance certaine de la Présidence de la République. En clair, en RDC, le poste de Président de la République n’aura plus de titulaire légal et légitime à partir du 20 décembre 2016 à zéro heure. 
  1. En matière de vacance de la Présidence de la République, l’article 75 de la Constitution dispose comme suit : « en cas de vacance pour cause de décès, de démission ou pour toute autre cause d’empêchement définitif, les fonctions  de Président de la République, à l’exception de celles mentionnées aux articles 78, 81 et 82 son provisoirement exercées par le Président du Sénat ».
  1. De cette rédaction, il ressort qu’en droit constitutionnel congolais, la vacance n’est pas différenciée ni dissociée de l’empêchement définitif. L’empêchement définitif est plutôt le fait générateur de la vacance de la Présidence de la République. Il peut résulter de n’importe quelle circonstance de fait et de toute raison de droit (légale) par lesquelles le Président de la République se trouve dans l’impossibilité absolue d’exercer ses fonctions, telles que la démission, le décès, la maladie incapacitante, l’enlèvement, la disparition, la condamnation pénale voire la mise en accusation pour haute transition, la fin légale du mandat du Président de la République, etc.
  1. En réalité, le Constituant n’a pas, en toute sagesse, voulu se risquer à prévoir l’imprévisible par une énumération exhaustive et limitative des causes d’empêchement. Il s’est borné à en définir les effets.
  1. C’est dans la même logique que la loi organique n°13/026 du 15 octobre 2013 portant organisation et fonctionnement de la Cour constitutionnelle dispose qu’il y a « empêchement définitif lorsque le Président de la République se trouve dans l’impossibilité absolue d’exercer personnellement les fonctions qui lui sont dévolues par la Constitution et par les lois de la République » ;
  1. Aussi, la fin du mandat présidentiel de Joseph Kabila le 19 décembre 2016 constitue t-elle une cause d’empêchement définitif qui crée, de plein droit, la vacance de la Présidence de la République en RDC. Cet empêchement définitif est d’autant plus évident qu’en ce qui le concerne spécialement, le Président Kabila ne peut plus briguer un troisième mandat aux termes de l’article 70 alinéa 1er de la Constitution, du reste, verrouillé par son article 220.
  1. A moins de vouloir violer la Constitution, la Cour constitutionnelle, saisie par le Gouvernement conformément à son article 76 alinéa 1er, devra tout simplement constater et déclarer aisément cette vacance.
  1. La vacance ayant été déclarée, il restera alors d’y pourvoir pour assurer la continuité de la fonction présidentielle et organiser l’élection présidentielle dans le délai prévu par la Constitution en pareilles circonstances.
  1. De la continuité de la fonction présidentielle et de l’organisation de l’élection présidentielle après Kabila

 

  1. La question de la continuité de la fonction présidentielle et de l’organisation de l’élection présidentielle après le Président Joseph Kabila a été résolue par les articles 75 et 76 de la Constitution sus évoqués.
  1. Pour rappel, en application de l’article 75 de la Constitution, en cas de vacance pour les raisons exposées ci-dessus, « les fonctions du Président de la République, à l’exception de celles mentionnées aux articles 78, 81 et 82 sont provisoirement exercées par le Président du Sénat ».
  1. Cette disposition constitutionnelle établit un régime juridique d’intérim limité dont la mission et la durée sont définies à l’article 76. Celui-ci indique, en effet, que « le Président de la République par intérim veille à l’organisation de l’élection du nouveau Président de la République dans les conditions et délais prévus par la Constitution ».
  1. A ce sujet, il convient de noter que la Constitution interdit au Président intérimaire d’exercer les attributions dévolues au Chef de l’Etat par ses articles 78, 81 et 82. Ainsi, il ne peut pas nommer un nouveau Gouvernement ni procéder à des nominations dans les catégories du personnel de l’Etat énumérées à l’article 81 de la Constitution ni dans la magistrature. Il ne peut, non plus, dissoudre l’Assemblée nationale (article 148 alinéa 2 de la Constitution).
  1. Quant à la durée de l’intérim, elle est de 90 jours (3 mois) au maximum, sauf prorogation jusqu’à 120 jours (4 mois) par la Cour constitutionnelle saisie, en cas de force majeure, par la CENI.
  1. Pendant ces temps, la CENI dispose de 60 jours au moins et de 90 jours au plus, après l’ouverture de la vacance, pour organiser l’élection du nouveau Président de la République.
  1. En définitive, au 20 décembre 2016, à défaut d’un Président de la République élu, c’est au Président du Sénat qu’il reviendra d’assurer l’intérim du Chef de l’Etat. Cet intérim aura pour seules missions d’assurer la continuité de la fonction présidentielle sans toucher aux institutions de la République et de faire organiser l’élection présidentielle dans 90 jours (3 mois) au plus tard, après l’ouverture de la vacance.
  2. Cependant, le Président Kabila et ses partisans soutiennent la thèse contraire, selon laquelle, le 20 septembre 2016 à 00 heure, il n’y aura ni vacance à la tête de l’Etat ni un quelconque régime de présidence intérimaire en RDC.
  1. En effet, selon eux, en vertu de l’article 70 alinéa 2 de la Constitution, Joseph Kabila demeurera Chef de l’Etat jusqu’au jour où un nouveau Président de la République sera élu.
  1. Pour rappel, l’article 70 alinéa 2 de la Constitution prescrit que « à la fin de son mandat, le Président de la République reste en fonction jusqu’à l’installation effective du nouveau Président de la République ».
  1. La lecture que le Président Kabila et sa Majorité présidentielle font de cette disposition constitutionnelle est erronée et dangereuse pour l’avenir de la démocratie et de l’Etat de droit tant en RDC qu’en Afrique en général.
  1. D’abord, la mise en œuvre de l’article 70 alinéa 2 requiert l’élection préalable du nouveau Président de la République dont l’installation se fait encore attendre. Tel ne sera pas le cas pour la RDC au 19 décembre 2006 si la situation actuelle reste en l’état.
  1. Ensuite, le bon usage du principe de la régularité et de la continuité des services publics qui sous-tend cet article, suppose un cas de force majeure (par définition imprévisible et imprévu) qui en justifie le recours, d’une part, et la bonne foi de celui qui en bénéficie les effets, de l’autre. Tel n’est pas le cas de la RDC ni du Président Kabila qui, comme relevé ci-haut, a systématiquement bloqué le processus électoral et empêché l’élection de son successeur dans le délai constitutionnel uniquement pour demeurer au pouvoir. Il est de règle générale en droit que nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude pour avoir gain de cause.
  1. Par ailleurs, le principe administratif de la régularité et de la continuité des services publics est d’application exceptionnelle et limitée dans le temps. Il ne peut, par conséquent, justifier et autoriser la prorogation d’un mandat électif, de surcroit, régi par la loi fondamentale.
  1. D’aucuns seraient tentés d’invoquer le cas des actuels députés provinciaux, des certains gouverneures et vice-gouverneurs des provinces et des sénateurs qui bénéficient déjà de 4 ans de mandat politique sans élection, pour justifier le maintien de Joseph Kabila à la présidence de la République Démocratique du Congo au-delà du 19 décembre 2016.
  1. Une telle comparaison n’est pas raison, car non seulement la vacance de la présidence de la République est bien réglementée par la Constitution, mais aussi les députés provinciaux, les gouverneurs et vice-gouverneurs des provinces ainsi que les sénateurs sont  victimes de l’incapacité, de la mauvaise foi et du manque de volonté politique des dirigeants de la RDC qui n’attachent aucun intérêt réel à l’organisation des élections et à l’alternance démocratique conformément à la Constitution de la République. Les anciens élus provinciaux et les sénateurs  de la première législature n’ont aucune responsabilité directe dans leur position gênante actuelle.
  1. Pour toutes les raisons développées ci-dessus, il ne peut être question de reconnaître à Joseph Kabila le droit de poursuivre l’exercice des fonctions de Président de la République Démocratique du Congo au-delà du 19 décembre 2016. Une telle reconnaissance violerait la lettre et l’esprit de la Constitution. Elle donnerait une prime à un coup d’Etat constitutionnel et ouvrirait royalement la voie à la restauration des régimes totalitaires tant en RDC que dans nombreux pays africains où les Chefs d’Etat s’accrochent au pouvoir contre la volonté de leurs peuples et au mépris des lois fondamentales de leurs pays respectifs.
  1. Il suffirait, désormais, à quiconque porté à la tête de son pays et disposant à sa guise des moyens que lui confère l’exercice abusif du pouvoir d’Etat, d’empêcher l’élection de son successeur pour se faire légitimer d’autorité et s’éterniser au pouvoir.
  1. Quoiqu’i en soit, dans le cas de la République Démocratique du Congo, quelle que soit la thèse que l’on soutient, si le successeur de Joseph Kabila n’est pas élu dans le délai prévu par la Constitution, deux évènements d’importance nationale se produiront absolument le 19 décembre à minuit : la fin du mandat de l’actuel Chef de l’Etat et la vacance de la présidence de la République. Ces deux faits juridiques et politiques majeurs appelleront inévitablement la mise en place d’un régime d’intérim du Président de la République tel que défini par la Constitution.
  1. Cependant, face à la détermination farouche du Président Kabila de rester au pouvoir et à l’instrumentalisation des institutions de la République par ses partisans et lui-même, il serait illusoire de penser que la seule rhétorique de la raison juridique les convertira, comme par un miracle divin, aux vertus de la démocratie et de l’Etat de droit. Bien au contraire, à Kinshasa et à l’intérieur du pays, ils ne cessent de démontrer chaque jour que la résistance au changement sera encore plus forte et fera davantage des victimes parmi les membres de l’Opposition et de la société civile hostiles aux thèses du pouvoir.
  1. C’est pourquoi, il est impérieux que la logique la légalité républicaine et de la légitimité démocratique soit accompagnée des fortes pressions populaires et de la communauté internationale pour espérer fléchir le Président Kabila et obtenir l’organisation des élections libres, pluralistes, transparentes et crédibles en RDC dans le respect de la Constitution.
  1. Ces pressions sont d’autant plus nécessaires et justifiées que le pouvoir en place qui gouverne par défi permanent, ne comprend que le langage du rapport des forces pour régler les problèmes politiques qu’il crée et auxquels le pays est confronté.

 

 

 

 

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