Skip to main content
Joseph Kabila et son dauphin, Ramazani Shadary

Après l'annonce de Kabila, la crédibilité des élections au Congo reste en cause, publié par Enough Team

La pression internationale est toujours nécessaire pour remédier aux principales lacunes en vue d'une élection libre et équitable et du démantèlement de la corruption systémique. Le nouveau candidat Shadary est sous le coup de sanctions européennes pour atteinte aux droits humains

Washington, DC - L’annonce faite hier en République démocratique du Congo que le président Joseph Kabila ne représentera pas un troisième mandat illégal lors des élections présidentielles prévues en décembre est une étape importante mais n’a pas résolu plusieurs problèmes essentiels pour assurer un processus électoral crédible et mettre fin à la corruption systémique et à la violence au Congo. Un processus électoral crédible est une étape clé pour jeter les bases d'une fin de décennies de mauvaise gouvernance et de corruption qui ont frappé le peuple congolais. La communauté internationale devrait maintenir une pression financière contre le régime de Kabila, à la fois pour assurer des élections crédibles en décembre et pour transformer le système kleptocratique du Congo.

Sasha Lezhnev, directrice adjointe de la politique chez Enough Project, a déclaré: « L’annonce d’hier, bien qu’elle soit une étape clé, ne rend pas le processus électoral crédible. La majeure partie de l'accord du 31 décembre n'a pas été mise en œuvre, la commission électorale avance avec les machines à voter malgré les craintes de vulnérabilités majeures en matière de sécurité, les leaders de l'opposition se heurtent à des obstacles majeurs. Les États-Unis, l’Union européenne et l’Union africaine devraient continuer à renforcer la pression financière sur le régime de Kabila pour assurer une transition démocratique crédible et contribuer au démantèlement du système kleptocratique violent au Congo. »

Plusieurs indicateurs clés sont appropriés pour la crédibilité des élections prévues pour décembre 2018 et le changement systémique au Congo:

1. Le régime de Kabila continue-t-il d'interdire ou de réprimer les manifestations en faveur de la démocratie et de maintenir des accusations inventées contre les militants de la société civile et les candidats? Les aspects importants de l'accord du 31 décembre 2016, y compris la mise en œuvre de mesures de décrispations politiques, n'ont pas été réalisés. L’accord du 31 décembre stipule que les accusations à caractère politique contre les militants et les candidats doivent être résolus, mais la plupart restent néanmoins en place. Le gouvernement maintient l'interdiction des manifestations en faveur de la démocratie, et les groupes d'opposition se heurtent à d'importants obstacles dans l'exercice de leurs droits de réunion, y compris des mesures de répression brutales. D'autres tactiques de répression du gouvernement contre les manifestants pacifiques se poursuivent notamment, arrestation illégale, détention et intimidation des membres de la société civile. Ces mesures répressives violent les droits fondamentaux du peuple congolais et corrodent le processus démocratique. L'interdiction devrait être levée, les accusations motivées par des considérations politiques devraient être abandonnées et les prisonniers politiques devraient être libérés.

2. La commission électorale a-t-elle recours aux machines à voter électronique et permet-elle de revoir le fichier électoral? Un récent rapport de The Sentry montre que les machines proposées pour le jour du scrutin présentent de sérieuses vulnérabilités en matière de sécurité susceptibles de compromettre le secret des bulletins de vote et d’entraîner une manipulation des votes. Le plan d'approvisionnement et de distribution de ces machines par la Commission électorale indépendante (CENI) reste opaque. On ne sait pas combien de machines la CENI a achetées sur un besoin estimé de 105 000 ou d’où est provenu le financement pour l’acquisition de ces machines. La CENI n’a pas non plus répondu aux appels à une plus grande transparence, y compris un examen du budget et des dépenses, et continue d’empêcher la société civile d’accéder à la liste des électeurs afin de mener un audit indépendant.

3. Si tous les candidats peuvent s’enregistrer. Des élections démocratiques crédibles n'auront lieu que si tous les candidats éligibles sont autorisés à s'enregistrer. Plusieurs candidats de l'opposition font état d'obstacles à l'enregistrement. La décision concernant les candidats qui seront finalement jugés éligibles aux élections appartient à la CENI et à la Cour constitutionnelle. Les observateurs ont exprimé des préoccupations concernant l'indépendance des deux institutions. La CENI doit veiller à ce que tous les candidats éligibles puissent participer aux élections.

4. Le gouvernement adopte-t-il des réformes clés en matière de responsabilité et de lutte contre la corruption? Les officiers militaires et les responsables gouvernementaux accusés et / ou sanctionnés de graves atteintes aux droits de l’homme restent en poste, et la corruption et la violence endémiques contre les civils se poursuivent dans les secteurs des ressources naturelles. Le gouvernement congolais devrait exiger que les entreprises publiques publient des audits financiers indépendants détaillés, ainsi que les contrats et des sous-traitances miniers et pétroliers, afin d’assurer la transparence des revenus tirés des ressources. Il devrait également coopérer avec le Département de la justice des États-Unis pour enquêter sur la corruption dans le secteur des ressources naturelles et permettre aux enquêteurs congolais et internationaux d’obtenir des preuves de violations flagrantes des droits de l’homme.

Un processus électoral crédible est une étape cruciale vers la création d'un système de gouvernance transparent et responsable au Congo - et en fin de compte pour le démantèlement du système global de kleptocratie violente. Plus de 750 millions de dollars ont disparus de caisse de la société minière Gécamines entre 2011 et 2014, 4,5 millions de personnes ont été déplacées au Congo en janvier 2018 et des partenaires commerciaux de Kabila tentent d'échapper aux sanctions américaines. Les États-Unis, l’Union européenne et l’Union africaine devraient intensifier les pressions financières et diplomatiques sur le régime de Kabila afin de garantir la tenue des élections de décembre 2018 et le début d’une transformation systémique — et non seulement le balayage des politiciens au moment qu’une kleptocratie violente reste incontesté.

Les nouvelles de cette semaine soulèvent également des questions majeures sur les véritables plans politiques de Kabila. La coalition au pouvoir a nommé l'ancien ministre de l'Intérieur, Emmanuel Ramazani Shadary, candidat à la présidence. Shadary a été sanctionné par l'Union européenne en 2017 pour son implication « dans la planification, la direction ou la perpétration d'actes constituant de graves violations des droits de l’homme en RDC ». Il dispose également d'une base politique très limitée et des milliards de dollars en jeu pour Kabila, sa famille et leurs partenaires commerciaux. On craint sérieusement que Kabila envisage de diriger derrière les coulisses.

Specifiquement, the Enough Project et The Sentry recommandent notamment que les États-Unis, l’Union européenne et l’Union africaine prennent les mesures suivantes:

1. Sanctions du réseau: Les États-Unis, l’Union européenne et le Conseil de sécurité américain devraient sanctionner les individus, leurs réseaux et les facilitateurs commerciaux impliqués pour decridibiliser le processus électoral, une corruption endemique et appliquer pleinement les sanctions existantes. Le Département du Trésor devrait également aller de l’avant avec les désignations dérivées des membres des réseaux de personnes précédemment sanctionnées. Le Département d’État devrait s’efforcer de coordonner les pressions avec l’Union européenne et le Conseil de sécurité des États-Unis, mais ne devrait pas attendre qu’ils agissent. Les précédentes sanctions des États-Unis et de l'Union européenne ont presque certainement contribué à atténuer la répression et à faire pression sur le gouvernement de la RDC pour qu'il signe l'accord du 31 décembre. La récente interdiction de visa émise par le Département d’Etat dans lequel il a annoncé des restrictions de voyage à l’encontre de plusieurs hauts dignitaires congolais pour leur rôle dans la facilitation de la corruption liée au processus électoral était également un signal utile. Cependant, cela fait plus d’un an que les hauts responsables congolais ont été sanctionnés sous E.O. 13671, et des désignations supplémentaires n'ont pas été déployées dans la mesure nécessaire pour avoir un impact durable sur les calculs de Kabila. La pression financière est extrêmement importante pour créer des resultats tangibles et un effet de levier significatif pour changer l’équation des élites kleptocratiques au pouvoir. La famille Kabila contrôle plus de 80 sociétés et les conseillers principaux de Kabila se sont livrés à un détournement important de fonds publics. Les États-Unis et l'Union européenne disposent d'un important levier financier en raison de la dépendance du régime vis-à-vis du dollar et de l'euro et de son interdépendance avec le système bancaire mondial.

2. Mesures de lutte contre le blanchiment de capitaux: Le FinCEN et les autres services de renseignement financier en Europe et en Afrique devraient prendre des mesures pour lutter contre le blanchiment d'argent et les activités financières illicites du président Kabila et de ses proches. Plus précisément, le FinCEN devrait utiliser son autorité de mesures spéciales en vertu de l'article 311 de la USA Patriot Act pour émettre un jugement contre les banques et autres institutions financières utilisées par le régime de Kabila pour les identifier comme entités présentant un problème de blanchiment de capitaux primaire. Le FinCEN devrait également émettre un avis sur les risques de blanchiment de capitaux associés aux secteurs bancaire et minier du Congo. Le FinCEN devrait axer ses enquêtes sur les banques qui facilitent le produit de Kabila et son entourage achetés illicitement pour empêcher l'accès au système financier des États-Unis à ceux qui blanchissent le butin de la corruption en RDC.

3. Pression coordonnée entre la communauté internationale et la région. Le Conseil de paix et de sécurité de l'UA et plusieurs gouvernements africains, dont l'Angola, le Rwanda et le Botswana, ont fait des déclarations fortes appelant le Congo à mettre en œuvre une transition démocratique crédible. Les États-Unis et l’Union européenne devraient se concerter sur cette question avec l’Union africaine et la Communauté de développement de l’Afrique australe et communiquer à Kabila l’importance d’adhérer aux principaux critères de gouvernance et de lutte contre la corruption. Les États-Unis, l'Union européenne et les Nations Unies devraient également reconnaître et amplifier la voix des militants de la société civile congolaise, qui prennent des risques importants pour continuer à s'organiser et demander une transition démocratique crédible et un système de gouvernement transparent et responsable.

Pour les demandes de renseignements des médias ou d’entrevues, veuillez contacter: Greg Hittelman, +1 310-717-0606, [email protected].

À propos de  THE ENOUGH PROJECT

Le projet Enough soutient la paix et la fin des atrocités de masse dans les zones de conflit les plus meurtrières d'Afrique. Avec son initiative d'enquête The Sentry, Enough contecarre les groupes armés, les régimes kleptocratiques violents et leurs partenaires commerciaux qui sont soutenus et enrichis par la corruption, les activités criminelles et le trafic de ressources naturelles. En aidant à créer des conséquences pour les principaux auteurs et facilitateurs d'atrocités et de corruption, Enough cherche à créer un effet de levier en faveur de la paix et de la bonne gouvernance. Enough mène des recherches dans les zones de conflit, parle avec les gouvernements et le secteur privé sur des potentielles solutions politiques et mobilise des campagnes publiques axées sur la paix, les droits de l'homme et la rupture des liens entre guerre et profit illicite. Pour plus d’information, rejoignez-nous - sur www.EnoughProject.org.

 

Categories

Add new comment

Filtered HTML

  • Web page addresses and email addresses turn into links automatically.
  • Allowed HTML tags: <a href hreflang> <em> <strong> <cite> <blockquote cite> <code> <ul type> <ol start type> <li> <dl> <dt> <dd>
  • Lines and paragraphs break automatically.