Skip to main content
Atlantic Council, Africa Center Director J. Peter Pham with Assistant Secretary Thomas-Greenfield. Peter Pham

Quid de la démocratie dans la République « Démocratique » du Congo ? par Dr. J. Peter Pham,

La constitution de la République démocratique du Congo (RDC) ne pouvait pas être plus clair : « Le Président de la République est élu au suffrage universel direct pour un mandat de cinq ans renouvelable une seule fois » (article 70) et « le nombre et durée des mandats du Président... ne peut pas être faire l’objet d’aucune révision constitutionnelle » (article 220). Par conséquent, le dirigeant actuel du pays, Joseph Kabila — qui avait pris le pouvoir après l’assassinat de son père en 2001 et ensuite fut proclamé le « gagnant » des élections qui avaient eu lieu en 2006 et 2011 — devrait se préparer à quitter le Palais de la Nation de Kinshasa pour faire place à un successeur qui devrait y être installé au 20 décembre. Cependant, qu’il n’y a rien qui bouge. En fait, quoi que ce soit, il y a beaucoup de signes inquiétants qu’à 44-ans, Kabila fils et quelques membres de son entourage seraient en train de planifier juste contraire, avec des conséquences potentiellement dévastatrices non seulement pour la démocratie congolaise, mais la paix et la sécurité de l’Afrique centrale dans son ensemble.

La légitimité du règne du jeune Kabila a toujours été au mieux, douteuse. Le père dont il avait hérité la présidence, Laurent-Désiré, était un aventurier qui réussit à prendre le pouvoir au cours de l’effondrement du long règne du dictateur Mobutu Sese Seko. La « Réélection » de Joseph Kabila à son (deuxième et dernier) mandat actuel était venue après que les élections étaient dénoncés comme « tricherie, mensonge, et terreur » par les évêques catholiques de la RDC, qui avaient basé cette déclaration à partir de preuves recueillies par les 40.000 observateurs formés qu’ils avaient déployés sur les lieux de vote à travers le deuxième plus grand pays d’Afrique. Les résultats étaient si entachés par des irrégularités que les évêques et d’autres observateurs indépendants découvrirent qu’un seul chef d’Etat africain, le président Robert Mugabe du Zimbabwe, s’était présenté lors de sa cérémonie d’inauguration — un reproche sans précédent dans les annales de l’Union africaine.

Le dirigeant de la RDC n’a pas non plus fait beaucoup pour se racheter depuis lors, en dépit des progrès impressionnants dans le produit intérieur brut (PIB) — et partant des recettes du gouvernement central — qui avaient résulté des efforts internationaux efficaces pour mettre fin aux hostilités dans la partie orientale du Congo et permettre un retour dans la normalité en termes d’activités économiques. Non seulement que le Congo se distingue actuellement dans sa 176e place parmi les 188 pays et territoires classés dans l’Indice de Développement Humain du Programme de développement des Nations Unies, mais, sous la direction de Kabila, la RDC se tenait à la 48e position sur 54 pays sur l’Indice de la Fondation Mo Ibrahim  sur la gouvernance africaine de 2015, derrière même des catastrophes humaines, comme le Zimbabwe et la Libye, et à peine juste avant les Etats complètement ratés, comme la Somalie et le Soudan du Sud. Le classement du pays en 2015 sur l’Index  de  la Perception de la Corruption du Transparency International n’était pas beaucoup mieux : 147e place sur 167 pays. Aussi, le pays ne peut réclamer beaucoup de crédit sur les réalisations entrepreneuriales du peuple congolais, qui ont relancé une économie une fois moribonde. Les citoyens réussissent en dépit de tout, mais pas à cause du gouvernement : Selon l’Indice de la « Facilité de Faire les Affaires » 2016 de la Banque mondiale, la RDC se classe 184e sur 189 de pays surveilles — il n’y a que la République Centrafricaine, le Venezuela, le Soudan du Sud, la Libye et L’Erythrée ou il est plus difficile de se lancer dans les affaires qu’au Congo de Kabila.

Par conséquent, il est donc pas surprenant que, même si — et cela est un grand si — Kabila envisageait de démissionner comme l’exige la constitution, ses alliés les plus proches soient moins enthousiasmés par la perspective d’avoir à battre campagne pour garder le pouvoir avec un bilan aussi lamentable. Ainsi, le régime a tout mis en œuvre pour éviter de quitter le pouvoir à la fin de cette année. Tout ce qui est imaginable a été essayé au cours de la dernière année :  bloquer les enfants légalement adoptés pour rejoindre leurs familles (afin de se donner une marge de manœuvre contre les gouvernements l’étranger), essayer de mandater un recensement national avant tout vote (dans un pays de la taille de la RDC, manquant par surcroit les infrastructures de transport, le recensement pourrait prendre des années), diviser les 11 provinces du Congo en 26 (bousillant ainsi le processus des élections locales et régionales déjà retardé, laissant le contrôle de la machinerie de l’Etat aux membres nommés par le régime). L’effort le plus récent est un appel dérisoire pour le « dialogue national » en vue de « discuter » d’une élection qui est déjà inscrite en tant que loi en lettre noire dans la constitution.

Un rapport en Décembre par la mission des Nations Unies au Congo a documenté la détention d’au moins 649 opposants politiques et des militants de la société civile au cours seulement des neuf premiers mois de 2015, et a noté plutôt diplomatiquement que « le rétrécissement de l’espace démocratique est susceptible d’influer sur le processus électoral. » Le rythme de la répression a repris cette année : Un rapport actualisé par la mission de l’ONU a trouvé pas moins de 383 violations des droits de l’homme par rapport à l’espace démocratique, dans seulement les deux premiers mois de 2016. Juste combien cet espace avait rétréci, était évident lors des élections des gouverneurs tenues il y a deux semaines dans la plupart des provinces : Après que les candidats de l’opposition aient été systématiquement exclus, les loyalistes de Kabila ont marqué une « victoire » tordue dans toutes les provinces, a l’exception de six (un deuxième tour est requis dans une province et les candidats indépendants ont prévalu dans cinq autres). Les gouverneurs intérimaires, qui resteront en fonction jusqu’à ce que les gouverneurs permanents soient élus à une date ultérieure non précisée, contrôleront les services de sécurité locaux et d’autres ressources bien à travers l’année critique en cours.

Il y a un an, au lendemain de la défaite électorale historique au Nigeria d’un président en poste par un candidat de l’opposition et de la transition pacifique du pouvoir qui s’en suivit dans le pays le plus peuplé d’Afrique, le président Obama téléphona Kabila pour souligner l’importance des élections dans le délai, crédibles et pacifiques qui respectent la constitution de la RDC et protégent les droits des citoyens congolais. Il y a peu de preuves que Kabila a été influencé par l’avertissement. En fait, le dirigeant congolais ne s’est même pas encore engagé sans ambiguïté de respecter la constitution et de quitter ses fonctions lorsque son mandat prend fin en Décembre.

Parler d' une élection nationale significative — respectant beaucoup moins les normes libres et équitables internationales —  qui soit encore en cours, reste douteux. Le mois dernier, le Conseil de sécurité de l’ONU est allé jusqu’à adopter une résolution exprimant sa « profonde préoccupation » sur « les retards dans la préparation des élections présidentielles prévues pour Novembre 2016, conformément à la Constitution, et que la mise à jour du registre électoral n’a pas encore commencé ». Loin d’apaiser ces préoccupations, il y a des rapports crédibles disant que le régime de Kabila envisage plutôt de mâter ceux qu’il considère comme une menace, y compris le groupe « G7 » de partis qui était une fois allié au gouvernement et Moïse Katumbi, le populaire ancien gouverneur du Katanga, dont la province a été divisée en quatre entités à peine viables après avoir démissionné du parti au pouvoir. Dans un signe troublant la semaine dernière de ce que le régime porte peut-être dans ses manches, Jason Stearns, le directeur du Congo Research Group de l’Université de New York et ancien coordinateur du groupe d’experts sur la RDC des Nations Unies, a été arrêté et expulsé du pays après avoir été cité dans un article de Bloomberg qui avait rapporté des révélations dans les « Panama Papers » concernant les avoirs de Jaynet Kabila, la sœur jumelle du président.

Il est important de comprendre que ce qui se passe au Congo ne reste pas au Congo. Dans son témoignage devant le Comité sénatorial des relations étrangères en Février, le secrétaire d’État adjoint aux affaires africaines, Linda Thomas-Greenfield avait reconnu que « la RDC risque une confrontation politique sur le respect de la constitution, y compris les limites de la durée du mandat, avec des résultats potentiellement désastreux pour la population de la RDC et la région ». Dans un rapport du mois dernier pour l’Afrique Centre du Conseil de l’Atlantique, Gérard Prunier, l’un des meilleurs experts mondiaux sur le Congo, était encore plus explicite dans son avertissement : « A moins que les Etats-Unis, l’Union européenne, et d’autres dirigeants du monde prennent un rôle actif, non seulement au Congo, mais aussi dans la région africaine des Grands Lacs au plus large va succomber à une nouvelle vague de violence. L’instabilité qui va suivre créera du chaos, mais beaucoup plus effrayant, l’opportunité aux groupes terroristes qui vont naitre du chaos ».

Docteur Pham est le directeur du Atlantic Council’s Africa Center

Add new comment

Filtered HTML

  • Web page addresses and email addresses turn into links automatically.
  • Allowed HTML tags: <a href hreflang> <em> <strong> <cite> <blockquote cite> <code> <ul type> <ol start type> <li> <dl> <dt> <dd>
  • Lines and paragraphs break automatically.