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Felix Tshisekedi

Bousculade et combat sans merci autour de Felix Tshisekedi autour de 617 millions de dollars

Africa Intelligence reporte que la décision d'arbitrage obtenue par Dig Oil contre la RDC dresse les conseillers présidentiels les uns contre les autres. Alors que le premier cercle de Félix Tshisekedi l'invite à transiger avec le pétrolier sud-africain, les avocats du pays plaident, à l'inverse, pour une contre-offensive énergique sur le terrain judiciaire. En jeu, près de 617 millions de dollars.

 

En fonction depuis le 16 février, le nouveau premier ministre Sama Lukonde Kyenge devra très rapidement se saisir du dossier du pétrolier sud-africain Dig Oil, le plus radioactif de ceux qui ont été laissés par son prédécesseur. Sylvestre Ilunga Ilunkamba s'est en effet embourbé dans une affaire que les proches du président Joseph Kabila, puis ceux de son successeur Félix Tshisekedi, ont volontairement embrouillée, jusqu'à la rendre indémêlable.

Africa Intelligence reporte également que la RDC a été condamnée le 7 novembre 2018 par la Chambre de commerce internationale (ICC) de Paris à payer 617 millions de dollars au pétrolier Le groupe se plaignait d'avoir attendu près de dix ans le décret présidentiel lui permettant d'opérer trois blocs de la Cuvette centrale (8, 22 et 23). De plus, Dig Oil est parvenu à faire condamner Kinshasa pour avoir attribué le bloc 1 du lac Albert à Caprikat et Foxwhelp (fondés par l'homme d'affaires israélien Dan Gerder), alors même que la firme sud-africaine avait aussi signé un contrat d'exploration sur ce même permis.

 

L'avocat qui tente d'aider la RDC malgré elle

Selon Africa Report, l'Avocat basé à Bruxelles, Philippe Chansey-Wilmotte est habitué à défendre les intérêts de l'Etat de RDC, avec lequel il a un contrat permanent depuis l'ère de Laurent-Désiré Kabila (1997-2001), ce qui lui permet de s'autosaisir de tout dossier menaçant le pays. A ce titre, il tâche désespérément d'épauler le gouvernement congolais dans son bras de fer financier face à Dig Oil. Félix Tshisekedi a confié le dossier à son vice-ministre de la justice Bernard Tâkahishc Ngumbi (membre de l'Union pour la démocratie et le progrès social - UDPS - de Tshisekedi) et c'est sous la supervision de ce dernier que Philippe Chansey-Wilmotte a tenté d'agir. Il avait d'ailleurs, dès mai 2020, fait part à Ngumbi de ses doutes sur la stratégie du gouvernement, sans succès.

Dans un document de sept pages intitulé "RDC c/DIGOIL" remis au vice-ministre de la justice en septembre 2020, auquel Africa Intelligence a eu accès, l'avocat belge explique qu'il n'y a pas lieu pour Kinshasa de payer le moindre dommage, ni une quelconque somme à Dig Oil. Il accuse le groupe pétrolier d'avoir mis en place un « montage destiné à créer artificiellement un semblant de dette à charge du Trésor public ».

 

Un dédommagement déjà conclu pour le lac Albert

D'après Africa Report, Philippe Chansey-Wilmotte explique que, étant donné qu'un contrat n'a force juridique, en droit congolais, qu'à partir du moment où il obtient le décret présidentiel (faisant référence ici aux blocs 8, 22, 23), il n'y a pas lieu d'attaquer l’État en justice tant que ce document n'a pas été obtenu. Or, tout décret ou ordonnance en droit congolais est établi à la "discrétion du président", c'est-à-dire qu'il peut choisir de signer ou non, sans avoir à donner la moindre explication. Dans la précipitation qui a suivi la condamnation arbitrale, Joseph Kabila a paraphé un décret présidentiel pour les trois blocs de la Cuvette centrale en décembre 2018, quelques jours avant la fin de son mandat.

Pour renforcer son argumentaire, l'avocat explique que, concernant le bloc 1 du lac Albert (de l'autre côté des découvertes ougandaises de Total et Cnooc), un dédommagement avait déjà été conclu entre les deux parties avant le lancement de la procédure arbitrale en 2016. En effet, un système de compensation fiscale avait été trouvé et Dig Oil avait abandonné, en conséquence, toute prétention sur le bloc 1. 11 n'y a donc pas lieu de lancer de processus judiciaire sur une affaire réglée. Détenteur des documents prouvant que cette compensation a bien eu lieu, le ministère des hydrocarbures semble faire de la rétention pour ne pas les rendre disponibles.

 

Les autorités congolaises pointées du doigt

Toujours selon l'avocat, la décision du 15 juillet 2020 du tribunal de commerce de Kinshasa-Gombe, qui rend exécutoire la sentence arbitrale de Paris, est le nœud du problème. En effet, elle permet à Dig Oil de négocier le paiement de la somme totale ou la prise d'actifs pétroliers ou miniers d'une valeur similaire. Le groupe sud-africain, cherchant à renforcer encore l'arbitrage de Paris, avait aussi saisi le 30 avril 2020 le tribunal de grande instance du district de Columbia aux États- Unis. Et la RDC a été condamnée par défaut le 15 septembre à payer la somme de l'arbitrage : Bernard Takahishc Ngumbi n'avait mobilisé aucun avocat pour défendre le point de vue de l'État (Africa Intelligence du 30/09/20).

Philippe Chansey-Wilmotte rappelle qu'il avait fait part de ses recommandations dès le mois de mai 2020, sans avoir été écouté. 11 propose dans son document d'engager sans délai un recours dans la procédure américaine en se rendant le plus vite possible à Washington.

 

Toujours dans ce document de septembre 2020, l'avocat belge constate une constante obstruction de la part du cabinet du vice-ministre de la justice (qui a été emporté avec le reste du gouvernement mi-février), venant en particulier de l'un des conseillers chargé du contentieux international, Bienvenu Fasso. Ce dernier avait contribué à ralentir les procédures et les transmissions de documents nécessaires à l'avancée du dossier. Au vu du retard pris, l'avocat a pris la décision de contacter directement la partie adverse, afin d'obtenir certains éléments manquants. Bienvenu Fasso aurait alors, à la demande de Ngumbi, décidé de stopper net tout contact de son conseil avec Dig Oil.

 

Responsabilités de certains proches du président

L'avocat belge souligne qu'une partie des responsables du dossier, qu'il appelle pudiquement "la filière" dans son document, préfère transiger avec Dig Oil au lieu de poursuivre la bataille judiciaire, sapant ainsi tout effort de mise en place d'un plan de bataille pour annuler les conséquences de la décision de Paris. Plusieurs membres du cabinet du président, comme son ambassadeur itinérant Nicolas Kazadi ou encore son conseiller privé, Fortunat Biselele, ex-administrateur de Dig Oil au Congo, sont plutôt, comme nous l'avions révélé, sur cette ligne de négociation (Africa Intelligence du 6/09/20).

L'ombre d'une autre personne particulièrement proche de l'ancien président Joseph Kabila, et non mentionnée dans le document de l'avocat, plane sur ce dossier. Il s'agit du désormais ex-président du Sénat - écarté le 5 février 2021 -, Alexis Thambwe Mwamba, vice-premier ministre en charge de la justice de 2016 à 2019 et déjà ministre de la justice de 2014 à 2016. Il aurait été l'acteur le plus influent de la stratégie de laisser-aller judiciaire conduisant aux différentes condamnations de la RDC. Une grande partie des conseillers encore présents au ministère de la justice ont été engagés sous l'ère Thambwe et sa mainmise sur l'appareil judiciaire en RDC, jusqu'à sa disgrâce du 5 février, était quasi totale. Il a notamment pu s'appuyer sur son ancien directeur de cabinet adjoint lorsqu'il était encore à la justice, André Kalenga-Ka-Ngoyi. Ce dernier est resté conseiller après le départ de Thambwe du portefeuille de la justice en 2019.

Contacté à de multiples reprises, Philippe Chansey-Wilmotte n'a pas donné suite à nos sollicitations.

 

JMM

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